Brêve histoire commentée du Saint Clergé de Valdiria
[Valdiria (La Dame des Rêves, la Dame, la Dame de l'Inspiration, la Lune)]

Valdiria est la principale divinité du royaume de Tyrande.
Son culte est propre à la région et était déjà suivi avant l'arrivée des maîtres actuels du pays.

Valdiria n'est initialement pas identifiée sous ce nom. Elle fut connue des habitants du royaume de Lithriel (le royaume originel de la région) sous le nom de Jheera et associée à l'astre lunaire.
Les attributs primitifs de la déesse de la Lune furent les pouvoirs lumineux qui guident l'humanité dans l'obscurité de la nuit et ses pouvoirs protecteurs.
Divinité maternelle et paisible, son clergé se modifia imperceptiblement avec l'arrivée des barbares Arinlins dans la région.
Panthéistes convaincus, les Arinlins furent peu à peu attirés par les aspects protecteurs de la déesse lunaire sans toutefois renier leur propre panthéon.
C'est vers la fin de l'âge des Conquêtes que le clergé lunaire devint un outil politique entre les mains des souverains barbares.

Seule divinité ayant un attribut martial dans le panthéon de Lithriel, la déesse de la Lune était censée conférer un caractère sacré à la force des guerriers de Lithriel et plus particulièrement à son roi. Cet attrait fit que les barbares Arinlins occupèrent avec le temps une place de plus en plus importante, en nombre, dans le clergé lunaire.

La crise éclata lorsque le haut clergé lunaire fut composé en majorité d'Arinlin. D'une évolution religieuse particulière, cela devint une véritable crise politique lorsque le clergé lunaire dirigé par les barbares refusa de consacrer le roi de Lithriel. Dépouillé de son caractère divin et de la protection de la déesse, le roi de Lithriel ne put garder la cohésion politique de son domaine qui explosa et se fragmenta pour être ensuite balayé dans une ultime invasion par les Arinlins.

Le rôle du clergé lunaire aurait pu s'arrêter là et la déesse, qui ne fait pas partie du panthéon originel Arinlin, aurait très bien pu disparaître dans l'oubli.
Néanmoins, le premier des rois Arinlins en Tyrande décida d'imposer la religion de la lune à tout son peuple et drapa tout le sacré de sa position dans le sacré des rituels de la lune, comme le firent les rois de Lithriel avant lui.

Les origines du culte lunaire en Tyrande et parmi les Arinlins sont donc un double héritage : celui des Lithrans qui honorèrent les premiers la déesse de la lune et apprirent avec patience à leurs envahisseurs et futurs maîtres les voies de la déesse mais aussi l'héritage de Pernangal Borthan, premier roi Arinlin en Tyrande, qui fit de la religion lunaire sa religion et l'imposa par la force à ses sujets.

Toutefois, le clergé lunaire du douzième siècle n'est qu'un instrument au service du roi de Tyrande. Façonné par Pernangal pour dépouiller le roi de Lithriel de son aspect sacré, composé désormais en presque totalité de prêtres Arinlins, le clergé n'a aucune réflexion théologique, se contentant de suivre et soutenir la politique générale du roi selon ses demandes.
Toutefois, les premiers signes de son émancipation du pouvoir royal sont déjà visibles même si la nette séparation entre le clergé et le roi sera encore longue à venir.


Le premier clergé et l'avènement Jhoriste

Né durant l'âge de la Conquête et mort avant la chute de Lithriel devant la puissance de Pernangal Borthan, Jhor Temerlaine fut le premier véritable prêtre d'envergure du clergé lunaire et Arinlin.

Sa vie fut érigée en modèle par les Arinlins de l'époque. Converti aux voies lunaires par des prisonniers Lithrans dont il avait la charge, Jhor profita d'un raid contre le royaume de Lithriel pour fuir son peuple avec quelques compagnons eux aussi convertis (par lui même cette fois).
Réfugiés dans le bas fleuve de Lithriel, Jhor abandonna ses voies guerrières et devint prêtre lunaire parmi les Lithrans.
Renégat pour son peuple, il fut pourchassé par son ancien chef de clan, Felsind Temerlaine. L'histoire prend alors une tournure dramatique et romantique lorsque Jhor, conscient que la volonté de vengeance de son ancien chef, décide de fuir ses nouveaux frères en religion et, par la même, abandonne sa bien aimée, une Lithranne rencontrée lors de sa fuite. Incapable de se décider, Jhor tardera tant que Felsind le retrouva, assiégea le fortin Lithran où il s'était réfugié.
Si la bien aimée de Jhor meurt lors d'un assaut, celui-ci survivra au siège. Sa grande victoire aura été de finalement convertir, à son tour, son ennemi et Felsind Temerlaine deviendra ensuite l'un de ses plus fidèles compagnons.

Jhor est considéré par le clergé lunaire du treizième siècle comme l'archétype du prêtre dont la volonté de protéger ceux qu'il aime est plus forte que tout. Et même si Jhor échoue d'une certaine manière à protéger son aimée, il parvient cependant à convertir son ennemi, ce qui protège le peuple Lithran dans son ensemble.
Dès lors, la mort de l'aimée de Jhor est commuée en sacrifice et devient sacrée.

A la suite de ces évènements, Jhor parcourra la terre de Tyrande inlassablement, enseignant le sens du sacrifice et le sentiment communautaire.

C'est à travers cet enseignement que le clergé lunaire instrumentalisé par Pernangal Borthan cherchera sa voie.
Les prêtres lunaire se changent alors en combattants, en défenseurs et transforment leur allégeance envers le roi pour l'allégeance envers le peuple Arinlin.

Le Jhorisme connut un franc succès dès que le clergé eut interprété et présenté la vie de Jhor au peuple. Spontanément et sans réellement volontairement, le clergé lunaire créa le premier ordre religieux combattant.

C'est également à cette époque de la gloire Jhoriste que se détermina l'identité de la déesse.
Le nom de Valdiria est un mot issu d'un ancien nom, celui d'un esprit qui habitait le soleil dans la philosophie panthéiste originelle des Arinlins. Cet esprit se nommant Valdir, il fut féminisé en Valdiria.
Cette dérivation du nom d'un esprit solaire en nom de la déesse de la lune permit au clergé de faire de grand progrès auprès du peuple. En effet, jusqu'alors, le clergé lunaire utilisait le nom de Jheera pour la déesse, un nom Lithran, un nom de vaincu.
En rebaptisant la déesse, qui plus est par un nom proche d'un esprit connu de toujours par les Arinlins, le clergé réinventa la divinité. Elle n'était plus Jheera déesse de la lune dont les Lithrans avaient révélé l'existence mais Valdiria, déesse de la lune, incarnation féminine du puissant Valdir du Soleil.
La déesse devenait leur et n'était plus une déesse étrangère.

Cette réforme sémantique combinée au Jhorisme créa un grand mouvement religieux parmi les Arinlins.
Quatre monastères du royaume de Tyrande sur cinq furent fondés à cette époque.

La lutte contre le Jhorisme

Cet accroissement de l'influence religieuse ne fut pas ignoré par les rois qui succédèrent à Pernangal. Cerian Borthan, roi de Tyrande et arrière-petit-fils de Pernangal dut faire face à l'institution progressive d'un véritable contre-pouvoir à son autorité à travers le Jhorisme et ses combattants au service du clergé.

Si certains chroniqueurs du Livre des Rois de Tyrande crurent bon d'appeler la révolte de 1240 la " révolte Jhoriste ", c'est toutefois une erreur encouragée par le clergé.
Cette légende de " révolte Jhoriste " prend racine dans un conflit tout à fait séculier qui débuta en 1238 par la révolte tout à fait politique du comte de Neredis contre le roi Cerian. Le Jhorisme étant fortement implanté dans cette province, les troupes du roi se retrouvèrent à plusieurs reprises obligées de combattre des guerriers Jhoristes qui formaient des corps de troupes homogènes.

En réalité, cet épisode ne montra qu'une seule chose, c'était que le Jhorisme s'effaçait finalement devant les loyautés semi-féodales de l'époque. Les Jhoristes ne combattirent pas le roi parce qu'ils étaient Jhoristes mais parce qu'ils étaient des Jhoristes de Neredis, fait qui supplantait toute autre forme de loyauté.

Malgré tout, si cet élément nous paraît quelque peu clair aujourd'hui, plus de quatre siècles après les faits, ce ne fut pas si évident pour les protagonistes de ce conflit.

Le roi Cerian, passablement impressionné par la capacité des Jhoristes à se constituer en troupes combattantes efficaces, conçut une méfiance toujours croissante envers le clergé de Valdiria naissant.
Il entreprit dès lors une campagne politique contre le Jhorisme et chercha à miner l'influence du clergé sur lui.
Il encouragea les barons de Tyrande à ne plus confier de poste d'influence aux Jhoristes déclarés, arguant que leur loyauté allait au clergé et non à eux.
Ces manœuvres n'eurent qu'un succès temporaire mais une conséquence plus grave à long terme. Les Jhoristes écartés de la vie politique en raison de leur religiosité déclarée formèrent des troupes combattantes sans lien féodal aucun. Constituées uniquement de Jhoristes, ne pouvant être soupçonnées d'œuvrer pour le compte d'un noble quelconque, les Jhoristes devinrent les défenseurs idéaux de la population.

Crise et Charte Cléricale

Cerian ne vit pas les conséquences de sa politique d'exclusion du Jhorisme, emporté parla mort en 1251 C'est son fils Lithar Borthan qui reprit de mauvaise grâce la lutte chère à son père.
Le nouveau roi laissa les Jhoristes en paix durant les vingt premières années de son règne, préférant bâtir routes, ponts, forteresses et murs d'enceintes, dressant les plans de nouvelles cités et arrangeant le défrichement des terres sauvages.
Pourtant, en 1262, un incident opposèrent une troupe Jhoriste aux fonctionnaires royaux sur le paiement d'un tonlieu à un pont nouvellement construit.
Les Jhoristes prétextèrent qu'ils ne devaient serment à quiconque si ce n'est à la déesse Valdiria et donc ne reconnaissaient aucun souverain en dehors de leur déesse tandis que les hommes du roi, insensibles à cet argument, leur refusèrent le passage au nom de Lithar Borthan..
La situation se dégrada lorsque les Jhoristes enlevèrent le pont par la force, sans toutefois tuer ou blesser gravement quelqu'un.
Le roi, apprenant l'incident, entra dans une noire colère et, par décret royal, déclara criminel quiconque porterait ouvertement les insignes Jhoristes, serait armé d'une épée tout en se déclarant homme de religion ou participant aux rites religieux en étant armé.

Les Jhoristes, clairement désignés comme ennemis de la Couronne de Tyrande, tentèrent de se soustraire à la justice royale en se dissimulant parmi la population.
Une énorme majorité de Jhoriste restait perplexe devant la colère royale. Elle se sentait assez religieuse pour se dévouer à la défense du peuple Arinlin au nom de la déesse Valdiria mais ne pouvait ignorer que le roi en était le guide sacré et le principal défenseur.
Les Jhoristes furent également fort surpris de se voir avidement poursuivis par les troupes de la noblesse au surplus des hommes du roi. Il leur semblait que tout l'appareil nobiliaire de Tyrande avait décidé de se débarrasser d'eux.

Lithar Borthan pourchassa les Jhoristes durant dix neuf années, sans jamais, toutefois, délaisser son œuvre de bâtisseur. Il ne connut pas l'épilogue de sa lutte, comme son père en avait été privé avant lui et mourut en 1280.
Il en reste dix neuf années de procès d'intentions, de dénonciations et d'emprisonnement.

Le mouvement Jhoriste ne fut pas réellement anéanti par cette chasse mais il cessa de se renouveler. La population, trop consciente de la vie d'un Jhoriste, ne voyait plus dans cette carrière religieuse et combattante un idéal de vie.

Lorsque Fendarh Borthan monte sur le trône, il est résolu à définitivement régler le problème Jhoriste. Pour cet homme élevé dans une atmosphère de lutte entre le roi et le clergé à travers le Jhorisme, il lui apparaît que la seule solution pour résoudre le problème passe par le clergé.

Dès sa première année de pouvoir, Fendarh soumet au Conseil Royal la Charte Cléricale. Face à l'assemblée de nobles Arinlin réunie, il explique que la noblesse va devoir céder une partie de son pouvoir aux prêtres afin de l'enchaîner à elle. Malgré une opposition conséquente, Fendarh parvint à faire admettre la Charte Cléricale par le Conseil Royal.

Les dispositions de cette Charte sont révolutionnaires pour le royaume. La Charte admet la présence de représentants du clergé de Valdiria au Conseil Royal, divise le royaume en trois parties définies, chacune étant à la charge spirituelle d'un prêtre qui siègera au Conseil. Enfin, la Charte accorde aux prêtres un statut emprunté à la noblesse en matière de justice et de finances. En contrepartie, les prêtres admettent qu'ils ne doivent pas briguer de domaines en leur nom propre autre que ceux octroyés par la Charte, ne peuvent frapper monnaie sans l'accord royal et admettent que les leurs puissent être jugés, à l'instar des nobles, dans les Plaids Royaux ou les Cours Ducales.
L'accord proposé par Fendarh n'est pas si aisément accepté par les prêtres. La plupart sentent bien que si la Charte leur semble finalement très favorable, eux qui n'ont rien, ils vont y perdre en indépendance.
Mais le clergé de 1280 n'a rien de commun avec notre Saint Clergé moderne. Là où notre Eglise serait capable de parler d'une seule voix, les prêtres de cette époque sont désorganisés, sans hiérarchie commune reconnue par tous.
Dans le chaos de réponse à l'offre du roi qui suivit, ce dernier commença à décerner privilèges et faveurs aux prêtres qui acceptaient la Charte.
A la tête des trois divisions spirituelles du royaume, il plaça un prêtre pour qui l'on créa la fonction d'Evêque et dont l'autorité supplantait celle d'un duc au niveau spirituel.
Au fur et à mesure que le roi distribuait les largesses, ceux qui se méfiaient de lui comprenaient que le roi ferait sans eux, comme s'ils n'existaient pas. Et, plutôt que de perdre les dernières opportunités de pouvoir que leur offrait le roi, ils acceptèrent eux aussi la Charte ou partirent en exil.

Fendarh Borthan, par sa Charte Cléricale, venait de créer une Eglise pour la déesse. En 1282 fut élu le premier Archevêque du royaume, équivalent religieux au roi lui même.

Le Jhorisme ne se remit pas de cette défaite du clergé face au roi. Organisé en Eglise, intégré dans le système féodal au même titre que les nobles, les Evêques devaient se comporter en suzerain et les Jhoristes devinrent de fait leurs sujets.
Aussi, lorsque le roi Fendarh exprima au tout récent Archevêque son souci de voir ces hommes armés se poser en défenseur du peuple au mépris de toute autorité, il ne lui fallut pas bien plus d'efforts pour que l'Eglise ordonna aux Jhoristes d'abandonner leurs pratiques sous peine de se voir refuser la communion avec la déesse.

Privé de son soutien spirituel, le Jhorisme disparut de la vie de Tyrande en tant que force majeure comme il l'avait été de 1200 à 1280 environ.
Si la tradition Jhoriste existe toujours dans la Tyrande moderne, c'est une philosophie maintenant bien encadrée par le Saint Clergé et non plus cette doctrine qui proclamait la justice au nom de la déesse selon les vertus de sa propre foi.

Le développement de la foi et la réflexion exégétique

La Charte cléricale avait peut être enchaîné le clergé au pouvoir royal mais elle lui donnait toutefois une importance sans égale. Hissé pratiquement au même rang que la noblesse, disposant d'une assise foncière jamais acquise auparavant, le clergé se retrouva soudainement avec de grandes ressources à sa disposition.
Les tout nouveaux prélats de Valdiria engagèrent le clergé dans une série de constructions : églises, monastères et institutions furent bientôt mises en chantier un peu partout à travers le pays. De nombreux édifices furent érigés en lieu et place d'anciens lieux de culte, qu'ils aient auparavant été dédiés à Valdiria (Jheera plus précisément) ou pas.

Cette phase de construction correspond à la fin de l'ère des rois bâtisseurs de Tyrande. Il est plus que probable que cette ère ait été prolongée par les besoins du clergé de se doter d'édifices religieux.
Le roi Fendarh Borthan lui même élèvera divers monastères au profit du clergé entre 1285 et 1305. A l'aube du quatorzième siècle, cependant, les premiers signes du grave conflit entre les rois de Tyrande et leurs voisins Vanirins mettent un terme à l'ère des rois bâtisseurs.

Ainsi, sous le règne de Fendarh, le clergé de Valdiria prospéra bien plus qu'au cours des deux siècles précédents.

Il résulte de cette intense période de développement une profonde réflexion sur les mystères divin, la foi et la Création.

En 1298 est fondé le Saint Ordre Exégète. Les prêtres Exégètes deviennent les penseurs du clergé. L'Ordre est composé de prêtres versés dans les secrets de la divination et de l'interprétation des présages.
Le rôle du Saint Ordre Exégète est de rassembler tous les mythes concernant la déesse de la lune et des rêves et d'en fixer le credo.

C'est ainsi à l'Ordre Exégétique que le Saint Clergé de Valdiria doit sa base théologique et ses premiers rites.
L'étude des mythes et des mystères de Valdiria fut compilée par les Exégètes dans une série d'ouvrages appelée Les Cantiques Lunaires.
A la fois livre de prières, guide pour l'interprétation des présages et source de compréhension des énigmes de la Création, les Cantiques n'ont pratiquement pas évolués depuis le quatorzième siècle.

Depuis la rédaction des Cantiques Lunaires, le rôle des prêtres Exégètes est de continuer à discuter de la nature de la Création et de fournir la réflexion théologique au clergé.

A la mort du roi Fendarh Borthan en 1325, le clergé de Valdiria n'a plus rien de commun avec cet outil politique fondé par Pernangal Borthan presque deux siècles auparavant. Il s'est doté d'une liturgie unifiée là où les pratiques religieuses différaient d'une région à l'autre, d'une analyse théologique de la Création à travers les mystères de Valdiria, de biens fonciers, d'édifices religieux servant à l'enseignement religieux et d'un pouvoir féodal réel après l'adoption de la Charte.

La lutte de la royauté contre l'Archevêché

Lorsque Fendarh Borthan meurt en 1325, le clergé perd à la fois le roi qui enferma les religieux dans la société féodale mais aussi son meilleur protecteur et l'un de ses plus grands bienfaiteurs.
Son fils Heyloen entre en conflit avec l'Archevêque de Tyrande dès son couronnement. Le sujet de discorde entre le jeune roi et le plus puissant des prêtres du Saint Clergé est le statut juridique des religieux.
La Charte établie par Fendarh implique que les prêtres soient jugés par les cours ducales au même titre que les nobles ou les fonctionnaires du royaume.
Or, Heyloen affirme que ce statut spécial ne peut être accordé qu'aux seuls prêtres du Haut Clergé, refusant par la même de considérer le Bas Clergé comme ayant un statut identique à celui de la noblesse.
Pour cela, Heyloen se fonde sur la coutume Arinlin qui précise que les nobles doivent être jugés par leurs pairs et que la noblesse est mise en évidence par la qualité d'Elu. Par extension, la noblesse de Tyrande disposant également de la propriété de la terre, le roi accorde au Haut Clergé un statut de noble puisqu'ils possèdent et gèrent des domaines fonciers. Mais il lui est impensable d'accorder ce même statut au Bas Clergé qui possède peu ou rien du tout.
L'Archevêque Elmor Lyrann sous estimera très gravement la détermination du jeune roi. Conscient de disposer d'un pouvoir grandissant sur le royaume, l'Archevêque pense pouvoir temporiser le roi suffisamment longtemps pour lui démontrer l'inutilité de revenir sur les termes de la Charte. Lorsque le roi aura réalisé que la population du royaume hésite à suivre son roi dans son attaque contre le clergé, Elmor est persuadé que la crise s'arrêtera.
La situation va lentement se détériorer entre les deux hommes sans qu'aucune solution ne se profile malgré le passage du temps.

En 1328, après trois années de tensions, Heyloen convoque soudainement ses barons et les chefs de la garde royale et donne l'ordre d'attaquer la citadelle Jhoriste près de la capitale. Cette citadelle intégralement payée par le Saint Clergé était terminée depuis 1326 mais venait seulement d'être occupée par sa garnison.

Selon la Charte, le Saint Clergé pouvait bâtir des forteresses à l'instar de la noblesse. La terre sur laquelle fut bâtie la citadelle appartenait au Saint Clergé, don du roi Fendarh.
Ce légalisme suffisait au Clergé pour se croire à l'abri d'une attaque en règle de la part du roi.
C'était toutefois sans compter sur le caractère hautement instable d'Heyloen, sa tendance à la paranoïa et aux réactions violentes.

La citadelle fut prise d'assaut et capturée dès le premier jour. Les templiers Jhoristes, incapables d'imaginer une attaque des troupes du roi, n'avaient mis en place aucune mesure sérieuse pour se défendre. Pris par surprise, ils furent submergés et ne purent empêcher les troupes Borthan secondées par les troupes royales d'entrer dans la place.
La citadelle, dûment soumise au pillage traditionnel, fut ensuite rasée par les troupes du roi, sur ordre expresse d'Heyloen.

Cet incident provoqua de terribles remous dans le royaume. La population fut particulièrement émue de voir son roi attaquer son clergé.
Les prêtres se virent soudainement pourchassés, revenus avant l'époque de la Charte Cléricale tandis que la noblesse vit, en grande majorité, une formidable occasion de faire disparaître tous les privilèges accordés par l'ancien roi au clergé.

Le Saint Clergé se retrouva ainsi brutalement comme projeté en pays ennemi. Sans personne pour le protéger, face à nue noblesse trop contente de laisser ce roi instable éliminer le rival religieux, le Saint Clergé capitula.

La période faste du Saint Clergé depuis l'établissement de la Charte Cléricale était révolue. Elle avait couru de 1280 à 1328, quarante huit années capitales pour la formation de l'église de Valdiria.

La fin de l'Archevêché

Heyloen Borthan sera un des rois les turbulents de Tyrande. Ne souffrant aucune contestation, même potentielle, de son autorité, il entra en conflit avec sa propre noblesse après avoir combattu son clergé.

De la fin de l'application de la Charte en 1328 jusqu'à sa mort dix années plus tard, Heyloen aura plongé le royaume dans le plus grand désordre.

Lorsqu'il meurt enfin, sans être regretté, son frère Kerlian croit pouvoir achever son œuvre sans difficulté.
Kerlian Borthan prononce par décret royal la fin de la fonction d'Archevêque, décidé à définitivement museler le clergé.

Mais c'en est trop pour le royaume. Redoutant de voir Kerlian être aussi instable que son frère et continuer sa politique erratique, un complot de la noblesse décide de l'assassiner.
Cela sera fait en 1339. Avec la mort de Kerlian, c'est également la fin de la dynastie Borthan et l'ascension des Eldried.

Hemiel Eldried, premier souverain Eldried de Tyrande, donnera garanties et preuves de sa bonne volonté à la fois au clergé et à la noblesse afin d'apaiser les esprits de tous et faire retomber la tension.

L'Évêché de Peshir et le martyr de Saint Caerdhan

Roi marin, Hemiel associe le Saint Clergé convalescent à la conquête de l'île de Peshir, dans l'océan d'Elaerth.
Pour cela, il encourage la création de l'Evêché de Peshir et dote le Saint Clergé de fonds pour bâtir les édifices nécessaires sur l'île.

Le but du roi Hemiel est de conquérir et assimiler l'île de Peshir, étape vitale sur l'océan d'Elaerth pour qui veut le traverser.
Conscient que son peuple n'éprouvera jamais d'attrait pour cette île perdue, sa pacification passe alors immanquablement dans la soumission de ses habitants, les Danaëriis. Dès lors, le Saint Clergé et le message de la déesse lui paraissent des plus adaptés.

La création de l'Evêché est le résultat des négociations entre le roi et les Evêques. Le clergé souhaitait voir être rétablie la fonction d'Archevêque éliminée par Kerlian Borthan.
Mais Hemiel refusa d'invalider la dernière décision de la dynastie précédente. Comme offre de remplacement, le roi promis de faire de Peshir un nouvel Evêché et confia qu'il souhaitait que l'administration de l'île soit effectuée par le clergé uniquement.

Cette proposition finit par séduire le clergé. Il ne recouvrait pas sa puissance de l'époque de la Charte ni son Archevêque, véritable rival du roi, mais la perspective d'un nouvel Evêché géré sans influence de la noblesse fut suffisante.

A terme, Hemiel confia au clergé qu'il espérait pousser au delà de Peshir à travers l'océan et débarquer sur les côtes d'Elaerth même afin d'y combattre et vaincre l'Empire de Rubis de Dakkaren.
Le discours royal prit alors de plus en plus les accents d'une invite à la lutte contre les ténèbres de Dakkaren et d'Elaerth. Il apparaissait évident au roi que le clergé devait alors être en pointe de la lutte contre le Dieu Noir et serait en charge de purifier les terres si longtemps dominées par l'Ombre.

C'est ainsi qu'en 1343 débarque sur l'île le premier Evêque de Peshir, un prêtre Exégète nommé Caerdhan.
L'île est alors depuis deux années occupée partiellement par les troupes royales.

Caerdhan, rompant avec tous les usages établis depuis l'instauration de la Charte Cléricale, se mit à prêcher comme un moine itinérant, prenant de court le clergé local arrivé depuis peu et qui ne cessait de s'émerveiller de voir son tout nouvel Evêque prêcheur.

Malheureusement, la carrière d'Evêque de Caerdhan fut aussi brève que glorieuse.
Durant presque une année, il parcourut l'île de Peshir en enseignant l'amour de la déesse, ses vertus inspiratrices et la passion pour la Création.
C'est lui qui révéla la présence sur l'île de l'un des quatre Oracles Élémentaires suite aux indications que lui données en songe par la déesse elle même. Il fut aussi le principal artisan de la présence Arinlin en cherchant à concilier les intérêts de la couronne de Tyrande avec le respect de la population Danaërii.
Malgré toute la bonté et la patience dont il fit preuve, Caerdhan trouva la mort dans les montagnes de Peshir, tué par des Danaëriis rebelles.

Choqué par la mort inattendue de Caerdhan, le clergé ne sut comment réagir. Alors que les troupes royales sur place se proposaient de châtier les Danaëriis pour ce meurtre, il fut décidé que des sanctions contre l'ensemble de la population était contraire à l'esprit de conciliation incarné par les prêches de Caerdhan. Ainsi, laisser les troupes royales exercer des représailles aurait anéanti les efforts déployés par Caerdhan.

L'assimilation de l'île de Peshir ne fut jamais complétée par le royaume. Le poste d'Evêque laissé vacant par la mort de Caerdhan ne fut jamais confié à un autre prêtre.
Caerdhan lui même fut considéré comme un saint homme, ayant reçu les conseils de la déesse en songe et bien vite, un ordre monastique fut fondé en son honneur et pour vivre selon son exemple.

Peshir cessa d'être le centre d'intérêt du roi Hemiel lorsqu'il fut contraint d'abandonner ses visées maritimes pour se consacrer aux problèmes intérieurs posés par la famille Borthan qui ne tolérait toujours pas la perte du pouvoir.
Privé du soutien royal, le Saint Clergé laissa peu à peu retomber les efforts de conversion des Danaëriis, conscient que l'urgence de faire de l'île un bastion de Tyrande n'existait plus.
Et, en 1361, à la mort du roi Hemiel, Peshir ne présentait plus d'intérêt. Et si l'Evêché de Peshir existe toujours en la forme, personne n'en assume la charge depuis Caerdhan, premier et seul Evêque de l'île.

Le Roi-Evêque

En 1428 meurt le roi Vandir Eldried, petit fils d'Hemiel. La couronne passe alors à son frère Raylen. Cette succession provoque une situation inédite puisque Raylen était déjà en titre de la charge d'Evêque de Thyrann.
Le nouveau roi dispose alors d'un pouvoir considérable.
Deux ans plus tard, Raylen tente de rétablir la fonction d'Archevêque. L'opposition au sein de la noblesse est immédiate et totale, ce qui le fait revenir sur ses projets. Toutefois, il réussit à faire admettre que les seigneurs du clergé aient le droit de siéger à toutes les cours de justice au même titre que les plus grands nobles du royaume.

Mais Raylen ne compte pas en rester là. Lors de la quatrième année de son règne, il autorise la fondation des Ordres Combattants de Valdiria dont l'organisation est confiée aux Jhoristes qui sont cette fois présentés comme les plus vertueux combattants du royaume.

La tension monte peu à peu entre le roi et son clergé d'une part et la noblesse menée par les Ducs d'autre part.
A l'ouest du royaume, la ville historique d'Elrhan se soulève contre le roi, chassant le bailli royal. La révolte s'étend assez rapidement à tout le comté de Lynaris, berceau de la présence Arinlin en Tyrande.

Raylen reste inactif face à cette révolte ouverte. Ne voulant pas envoyer ses soldats combattre la population de Lynaris, il s'en remet au Duc d'Ehrin pour ramener le calme et l'autorité sans réaliser que cette même révolte arrange bien les affaires de la noblesse ducale.

Dès lors, la situation dans le royaume dégénère graduellement de la simple révolte d'un Comté à une guerre civile en règle entre le roi soutenu par le Saint Clergé et les Ordres Combattants contre la noblesse.
En 1438, le Duc d'Ehrin fait appel au royaume voisin de Tenerra pour emporter la décision. Si cette manœuvre échoue, elle a le cruel désavantage de brouiller la donne dans le royaume. Certains nobles opposés au roi voient d'un très mauvais œil cette intrusion étrangère sans pour autant arrêter de combattre Raylen tandis que d'autre changeront de camp. Enfin, une fois les troupes de Tenerra parties, les allégeances changeront encore une fois.

Le sort du roi Raylen est décidé en 1455 à la bataille de Corvinia. Composée de levée paysanne encadrées par les chevaliers Jhoristes, l'armée royale et cléricale est écrasée par les troupes nobiliaires.
Raylen est ainsi forcé d'abdiquer et d'abandonner sa charge d'Evêque. C'est aussi la fin de la première dynastie Eldried avec l'élection d'Eren Castaril comme roi.

Poursuite de la guerre civile et affaiblissement du clergé

L'avènement des Castaril ne permet pas le retour à la paix et la guerre civile, bien que retombée en intensité, se poursuit.
Toutefois, l'enseignement du règne du Roi-Evêque conduit le roi Eren Castaril a prononcer l'interdiction pour les prêtres de régner en leur nom propre. Cette décision, destinée à éviter le retour d'un Roi-Evêque, est plus lourde de conséquence que ne le prévoyait Eren Castaril puisqu'elle peut être interprétée comme une interdiction formelle pour le clergé à disposer de biens fonciers en son nom à un quelconque niveau.

Le retour des Eldried

La dynastie Castaril n'aura donné que trois rois à Tyraned et cessera en 1499 à la mort du roi Effrien Castaril à la bataille de Marinalden dans le pays de Tenerra.
Avec l'élection d'Asten Eldried comme roi, c'est le début de la seconde dynastie Eldried et le renouveau de l'alliance entre la fonction royale et le clergé.

Lorsque le roi Asten prononce l'hérédité de la charge de roi en 1511, il est soutenu par le Saint Clergé qu'il a su convaincre.
Après cette victoire politique, le roi propose le financement des édifices religieux du Saint Clergé qui a de grosses difficultés financières depuis les coups successifs portés à la Charte Cléricale.

C'est ainsi qu'en 1513 commence la construction de la cathédrale de Lindoriel, destinée à être la plus grande église de la déesse dans le royaume.

Suit alors une nouvelle campagne maritime contre les côtes d'Elaerth, Asten Eldried suivant ainsi la vision d'Hemiel Eldried.
Peshir reprend alors son importance et les hommes du roi fondent alors en 1518 la cité portuaire de Dirshan afin de servir de base avancée dans la lutte contre l'Empire de Rubis.

Le rétablissement de la coopération entre le roi et son clergé cesse pourtant avec la mort du roi Asten. Son fils Terghan se montrera alors nettement moins pressé de faire appel au clergé et plus enclin à renouer avec la noblesse.
C'est pourquoi en 1540, après avoir réussi à faire admettre après une âpre lutte au Conseil Royal une réforme monétaire, le roi Terghan va refuser presque toutes les doléances du clergé.
Malgré les espoirs cléricaux, la fonction d'Archevêque n'est toujours pas rétablie par le roi, l'interdiction de régner est confirmée ainsi que l'interdiction de bâtir des forteresses. La seule concession faite par Terghan est la reconnaissance des Ordres Combattants mais cette reconnaissance est assortie d'un contrôle royal inédit en attachant à chaque ordre un bailli royal et en forçant les maîtres des Ordres a prêter serment au roi en plus de celui fait au clergé.

La montée du Dyrlianisme

C'est en 1550, au plus fort de la révolte des Barons de la mer contre le roi Terghan que la moniale Dyrlia commence son périple vers le centre d'Hannoerth. Son voyage la mène vers la Grande Plaine d'Ehrin, site de la naissance de la nation Arinlin dont elle fut chassée mille ans auparavant.

Elle passera cinq années dans la Grande Plaine, parlant de la déesse autour d'elle mais aussi écoutant les mythes entourant la Création que lui rapportèrent les autres peuples.
Lorsqu'elle revient en Tyrande en 1555, le roi Terghan vient de prononcer la création de la charge d'Archimage du royaume, faisant évoluer la plus traditionnelle charge de Haut Mage Royal.
Cette coïncidence est capitale car sans elle, les paroles de Dyrlia n'auraient sans doute pas eu le même écho.

De son périple, la moniale ramena une vision différente de la Création et donc de la déesse.
Le credo traditionnel déterminé par les Exégètes vers 1300 énonce que la Création ne peut être appréhendée dans son ensemble par le mortel mais qu'à travers l'adoration de la déesse, on parvient à œuvrer pour la Création dans sa globalité. Ainsi, la déesse est donc le seul réceptacle de l'adoration pour le compte de la Création dans son ensemble.
Or, Dyrlia vint professer que cette vision était incomplète mais que l'erreur était explicable. Selon elle, cette vision était déformée par le fait que les Exégètes ne connaissaient pas les rites efficaces pour vénérer la Création dans son ensemble. Dès lors, ils ne pouvaient que rester sur un constat d'échec alors que les rites destinés à Valdiria étaient jugés efficaces.
Ce discours de Dyrlia se heurta bien vite à l'hostilité d'une partie du clergé qui vit là un retour vers le panthéisme originel. Pourtant, Dyrlia montra ses rituels et chercha à démontrer qu'ils servaient à adorer la Création au sens conceptuel et non une figure précise comme un esprit, la tempête ou une roche ce qui est la marque du panthéisme.
Comme sa méthode de rendre hommage à la Création était universelle, elle ne pouvait donc se tromper et était incapable de vénérer soit un élément inerte de la Création qui ne devrait pas être vénéré ou un être divin dévoyé ou déchu qui ne mériterait pas cette adoration.

La discussion aurait pu en rester au niveau du débat entre les Exégètes et Dyrlia sans jamais sortir des salles de discussion des monastères si le roi Terghan n'avait pas défini la fonction d'Archimage.

Dyrlia sut effectuer un parallèle entre sa vision et cet acte royal. L'Archimage était en effet défini par le roi comme le gardien des arcanes du royaume, réceptacle de la magie de Tyrande. Or, afin d'éviter que cette charge ne devienne à terme un rival politique, le roi avait pris soin de nuancer sa définition en précisant que si l'Archimage était le réceptacle de la magie du royaume, il n'était pas le royaume. L'Archimage, ainsi, était le premier des mages du pays mais en aucune manière la seule manière d'user de la magie de la terre.
A la demande de Terghan, le Saint Clergé avait étudié ce concept est décidé que cette vision était correcte. L'Archimage était le mieux qualifié pour user de la magie du royaume mais pas obligatoirement le seul à pouvoir le faire et le seul vers qui se tourner.
Elle affirma que la dévotion à la déesse était sur le même principe. Si la déesse était l'interlocuteur privilégiée, la Création ne se limitait pas à la déesse seule et si Valdiria représentait la divinité la plus qualifiée pour écouter leurs suppliques, rien n'interdisait de vénérer la Création dans son ensemble.

L'affaire fit grand bruit dans le Saint Clergé. L'absence d'une autorité suprême comme l'Archevêque qui aurait pu trancher dans le débat fut aussi cruellement ressentie.
L'Ordre Exégète s'empara du débat et considéra qu'il était seul à pouvoir répondre aux interrogations et doutes de Dyrlia.
Cette attitude monta les trois Evêques contre l'Ordre et chacun d'entre eux se prononça sur les idées de Dyrlia avant même que l'Ordre Exégète ait fini son débat interne.
Les Evêques de Caranie et de Thyrann annoncèrent que Dyrlia se trompait et que le risque de vénération mal placée était bien trop grand pour s'aventurer hors de la doctrine des Cantiques Lunaires.
L'Evêque du Levant, par contre, annonça que Dyrlia avait ouvert une nouvelle voie dans la vénération et la passion pour la Création et que grâce devait lui en être rendue.

Cette dernière décision faussa tout le débat des Exégètes. En effet, si l'Ordre concluait comme les Evêques de Caranie et de Thyrann, l'Evêque du Levant se voyait désavoué. Or, si on pouvait imaginer renvoyer la moniale Dyrlia à l'étude des Cantiques, la même chose ne pouvait être faite de l'Evêque. Le risque était bien évidemment que ce désaveu ne mine la crédibilité de tout le Saint Clergé.
Aussi, l'Ordre Exégète décréta à la fin de son débat interne que Dyrlia ne s'était pas fourvoyée dans les voies panthéistes même si il était nécessaire d'être particulièrement attentif à ne pas voir sa vénération détournée en pratiquant l'adoration de la Création.

Ce que l'on appela par la suite le Dyrlianisme connut un succès initial foudroyant parmi le clergé. De nombreux prêtres se retrouvèrent dans les idées de Dyrlia et commencèrent à travailler à l'élaboration des rites corrects pour rendre hommage à la Création, en plus de la déesse.
Dans la population, le Dyrlianisme fut moins suivi mis à part dans le duché de Danarra et plus précisément dans les familles d'origine Danarranne ou Lithranne.

La rédaction des rites Dyrlianistes fut achevée en 1600, près de vingt ans après la mort de la moniale Dyrlia, avec un livre appelé le Chœur de la Création.

Le Théurgisme, continuation du Dyrlianisme

Le dernier soubresaut clérical eut lieu en 1660. Contre attente, il fut provoqué par la composante la plus rigide du Saint Clergé, l'Ordre Exégète.
N'ayant pas digéré d'avoir été privé de la décision ultime concernant la Dyrlianisme, les moines Exégètes poussèrent l'analyse des paroles de Dyrlia. Malgré une volonté initiale de trouver la faille dans l'enseignement de la moniale, quitte à provoquer une crise majeure dans le Saint Clergé, les Exégètes ne purent que constater que rien ne pouvait être reproché à Dyrlia.
La moniale fut alors déclarée sainte et se retrouva aux côtés de grands noms du clergé comme Jhor et Caerdhan.

Mais les Exégètes orientèrent leurs recherches spirituelles dans une nouvelle voie : la théurgie.
Si Dyrlia considéra que l'on pouvait adoré la Création dans son ensemble, les Exégètes avaient du mal à accepter l'absence de relation personnelle entre le prêtre et la divinité. Aussi, ils cherchèrent à définir une manière d'adorer la Création dans son ensemble tout en parvenant à rétablir une liaison comme celle qui existait entre Valdiria et eux. La théurgie fut leur réponse.
Cette technique spirituelle consiste à identifier et séparer la Création en grands ensembles, en concepts clairement définis. Dès lors, le prêtre peut orienter sa vénération vers un concept plus précis de la Création qu'un autre et ainsi créer un lien plus fort que s'il vénérait la Création entière.
Cette conceptualisation de la Création, notion déjà abstraite pour beaucoup, eut encore moins de succès que le Dyrlianisme dans la population. Même au sein du clergé, la théurgie fut considérée comme une voie sans issue par beaucoup et même certains toujours peu accoutumés au Dyrlianisme ne virent dans les Théurgistes que des Dyrlianistes sous un autre jour.

En 1685, le Saint Clergé n'a toujours pas déterminé si la Théurgie était une voie valide. En effet, l'Ordre Exégète est le géniteur de la Théurgie et en théorie composé des penseurs du Saint Clergé aptes à juger une philosophie. Ainsi, par défaut d'érudit, le Saint Clergé ne peut condamner ou accepter la Théurgie autrement que chaque prêtre à titre individuel.


Le Saint Clergé est désormais composé de plusieurs grandes tendances qui cohabitent sans heurts les unes avec les autres.
La plus grande masse des prêtres suit les enseignements contenus dans les Cantiques Lunaires et sont parfois appelés le Clergé Liturgique (surtout par les autres tendances et avec parfois une pointe condescendante).
Les Jhoristes sont les témoins d'une époque depuis longtemps disparue, gardiens des traditions où la déesse s'appelait encore Jheera et pas Valdiria, était une déesse Lithranne et pas Arinlin. Ils mettent l'accent sur le côté protecteur de la déesse, avant toute chose.
Les Caerdhanistes suivent les enseignements de l'Evêque martyr de Peshir. Leur vie est centrée sur l'ouverture, la tolérance et le prosélytisme.
Les Dyrlianistes sont proches des panthéistes. Ils refusent de ne voir en Valdiria que le seul et unique moyen de communier avec la Création.
Les Théurgistes sont des chercheurs de la foi, conceptualisant la Création, la séparant et l'ordonnant afin de mieux canaliser leurs prières vers elle.